Les implications juridiques de la blockchain et des cryptomonnaies : une analyse éclairée

La technologie de la blockchain et les cryptomonnaies soulèvent un certain nombre d’interrogations d’ordre juridique. Cet article se propose d’analyser ces questions en adoptant le point de vue d’un avocat expert en la matière.

La qualification juridique des cryptomonnaies

Pour aborder les implications juridiques des cryptomonnaies, il convient tout d’abord de déterminer leur qualification juridique. Les cryptomonnaies sont-elles des biens, des valeurs mobilières ou encore des instruments financiers ? Selon une directive européenne, les monnaies virtuelles sont définies comme « une représentation numérique de valeur non émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique ». Toutefois, cette définition ne permet pas de trancher clairement sur leur qualification juridique.

En France, l’Autorité des marchés financiers (AMF) considère que les jetons émis lors d’une Initial Coin Offering (ICO) peuvent être qualifiés de valeurs mobilières si elles confèrent des droits similaires à ceux attachés aux actions ou aux obligations. Quant aux cryptomonnaies, elles sont assimilées à des actifs numériques. Cette distinction a pour conséquence de soumettre les opérations sur ces actifs à certaines règles du droit boursier et financier.

La régulation des acteurs de la blockchain et des cryptomonnaies

En raison de leur caractère décentralisé, les activités liées à la blockchain et aux cryptomonnaies échappent souvent à la régulation traditionnelle des marchés financiers. Toutefois, les autorités publiques et les régulateurs cherchent à encadrer ces activités pour éviter les abus et protéger les consommateurs.

En France, une réforme du cadre juridique applicable aux actifs numériques a été adoptée en 2019 avec la loi Pacte. Cette réforme vise notamment à encadrer les ICOs et les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN). Les PSAN sont désormais soumis à un régime d’enregistrement obligatoire auprès de l’AMF lorsqu’ils exercent certaines activités (conservation d’actifs numériques pour le compte de tiers, achat/vente d’actifs numériques contre monnaie ayant cours légal).

La protection des investisseurs dans les projets liés à la blockchain

Du fait de leur nouveauté et de leur complexité technique, les projets liés à la blockchain peuvent présenter un risque pour les investisseurs qui n’en maîtrisent pas toujours les enjeux. Ainsi, il est essentiel que ces derniers bénéficient d’une information complète et transparente sur ces projets avant de décider d’y investir.

C’est pourquoi le législateur français a prévu un dispositif spécifique pour encadrer les ICOs. Les émetteurs de jetons doivent désormais fournir un document d’information qui présente de manière claire et précise les caractéristiques du projet, les droits attachés aux jetons, les risques liés à l’investissement et les modalités d’exercice des droits des porteurs de jetons.

La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme

Les cryptomonnaies peuvent être utilisées à des fins illicites, notamment pour faciliter le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Pour lutter contre ces risques, les autorités publiques ont mis en place un dispositif spécifique afin de renforcer la transparence des transactions réalisées en cryptomonnaies.

Ainsi, depuis 2020, les plateformes d’échange de cryptomonnaies sont soumises aux mêmes obligations que les établissements financiers en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT). Elles doivent notamment vérifier l’identité de leurs clients et déclarer à Tracfin (le service français chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent) toute opération suspecte.

Les aspects fiscaux des cryptomonnaies

Les gains réalisés lors de la cession ou de l’échange de cryptomonnaies sont soumis à l’impôt sur le revenu en France. La législation prévoit deux régimes d’imposition différents selon la nature des gains : les gains occasionnels sont imposables au taux forfaitaire unique (flat tax) de 30 %, tandis que les gains résultant d’une activité habituelle sont soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu.

Par ailleurs, la détention de cryptomonnaies doit être déclarée à l’administration fiscale française dans le cadre de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) si leur valeur dépasse un certain seuil.

En conclusion, la technologie de la blockchain et les cryptomonnaies soulèvent de nombreuses questions juridiques, notamment en matière de qualification juridique, de régulation des acteurs, de protection des investisseurs, de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et d’imposition fiscale. Les autorités publiques et les régulateurs cherchent à adapter leur cadre juridique pour encadrer ces activités tout en préservant leur potentiel d’innovation.